28 mars 2017

Merci le festival Quand on Conte !


 C'était tes vingt ans,

Ta salle résonnait tellement que je me retrouvais à aller plus loin et plus profond que ce que je pensais possible, je n'en finissais plus d'explorer les possibilités de cette résonance, de venir sur vos genoux voir comment ça sonnait là haut, de vous inviter aussi à tout écouter, d'ici. On essayait un nouveau micro qui m'enthousiasmait assez follement, et additionné avec la reverb et le fait que Tibô, qui travaille le son et ses textures de manière déjà franchement géniale d'habitude, commençait à bien connaître le concert après trois ou quatre tours de pistes ensemble, on avait un total sonore à peu près égal à une texture entre un yaourt velouté 100% crème et un chaton angora poils extra-longs. Bref, j'étais contente. (Quoique citer les deux ensemble dans une même phrase fasse plutôt penser à une cuillère pleine de poils de chat aux yaourts. ) (il faut vraiment que je pense à télécharger l'appli "coordination de métaphores")
Côté lumière, il y avait aussi de quoi faire de petits bonds de joie. Le plateau était beau, doucement enfumé, et Pierrot qui pourtant jonglait avec une console dont il n'avait pas l'habitude, avait scrupuleusement noté toutes les ambiances de mes chansons, on inventait des paysages ensemble, avec les conseils de Julien, moi perchée là haut avec eux sur la console, et Stu ou Clement prenaient la pose pour figurer ma silhouette au milieu de toutes ces couleurs, "tu crois qu'on peut piquer ta lampe frontale?" , et comme ils disaient oui, "tu crois qu'on peut prendre le vieux projecteur de déco, le Cremer, et s'en servir vraiment"? , et comme ils disaient oui "tu crois que pendant que tu m'imites pour qu'on fasse les lumières tu peux aussi teindre tes cheveux en bleu pour voir comment ça fait" et comme ils disaient non "ah tant pis".
A part reteindre tout le monde on a tout essayé, j'ai aussi repris la Barbie et l'équilibre mi-clownerie, mi-violence-et-hallucinations-racontées, de BOMT, ma reprise de Baby One More Time.
Britney avait perdu une main dans la bataille mais on était superheureuses de se retrouver quand même, sa petite robe à paillettes scintillant dans l'ombre.

C'était si facile, si fluide, de me promener dans tous ces paysages avec vous, dans ce festival de la Parole qui tient debout depuis 20 ans, avec ses bénévoles qui cuisinent, qui montent et démontent, qui choisissent et organisent, et qui m'ont fait signer affiche sur affiche au milieu des flans à la noix de coco et des lentilles à l'indienne.

A la fin du spectacle j'ai fait descendre tout le monde oui, j'ai dit jusqu'à ce qu'on s'en remette je chanterai Leonard Cohen, et je m'en remettrai jamais c'est sûr, j'ai dit encore une fois "le poète n'existe plus mais ses chansons existeront toujours", et puis j'ai fait ma chanson d'oubli, ma chanson ancienne venue pour faire un cadeau de vie et de mort, une chanson rituelle qui appartenait à tous, une chanson a capella dans cette salle qui résonnait si fort, tous ces gens assis sur le plateau, leurs grands yeux dans les couleurs et la fumée, et mes pieds qui tapaient contre le sol, c'est la terre, c'est la terre, qui reprend tous ses enfants, laisse toi tomber dedans, j'ai chanté, chanté tout ce que j'ai pu, et puis je suis partie, voilà.

Je suis repartie avec mes Mimosas, avec mon souvenir du papillon-frelon qui m'a attaqué en droite ligne au milieu de "Bonsoir", à tel point que j'ai du m'arrêter pour éclater de rire et m'enfuir, avec mes souvenirs de chansons réclamées et oubliées, avec tous ces paysages enfumés, cet accueil fou, ce velours de son, et vos yeux, vos sourires, est ce que je peux te prendre dans mes bras, est ce que tu veux bien signer mon ticket, est ce que je peux te dire merci, qu'est ce que c'est que ta chanson ancienne de l'oubli, toutes ces questions étaient comme des cadeaux, je recevais tout, je les mettais dans ma poche, avec mes guitares et mon mimosa, et puis je filais retrouver Paris.


(credit photo : Philippe, Quand On Conte )


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