Chère Menuiserie,
je t'écris depuis les rivières de la
Lozère
depuis ce train qui survole les forêts,
les gares abandonnées, les cimetières
le temps passe et coule comme les
rapides en bas
et je m'aperçois que je ne t'ai pas
encore dit Merci
Merci de m'avoir accueillie dans le
secret de ta petite salle
merci les énergies ramassées sur les
fauteuils
la petite Rosa qui s'approchait de la
scène
ma chanson de tremblements fiers,
perchée sur le seul fauteuil du public,
qui permettait d'être vue des deux
côtés
il faut que je te dise chère
Menuiserie
je voudrais toujours venir au concert
en pleine lumière
mais ce jour là j'étais prise dans
les nuages de ma météo intérieure
ça arrive, les tempêtes soudaines,
les pluies de questions
credit photo : Pierre Louatron |
Je voulais te donner tout ce que
j'avais
mais tout ce que j'avais ce jour là ce
n'était plus vraiment beaucoup
comme ce jour où petite j'étais allée
à un anniversaire d'adulte
et où avec l'ivresse et les talons, le
gâteau à trois étages portée par l'hôte n'avait pas résisté
aux deux marches du perron
je me rappelle de ce moment, les
adultes entre la panique et le fou-rire
de la crème renversée partout
et de la fête qui avait continué
joyeusement
eh bien samedi chère Menuiserie,
j'étais ça, ce gâteau renversé, remis dans les assiettes avec le
gravier et la terre
pour ne plus tomber je me tenais au fil
de ce que j'avais prévu
je respirais doucement doucement
et être avec vous dans cette salle
aimante, dans le cocon de ces chansons que je connaissais bien
c'était la chose la plus douce que je
puisse imaginer
je me disais, parfois mon coeur aussi a
des talons ivres, et la vie a tellement d'escaliers
A ce moment précis de ce soir précis
c'était si réconfortant de faire ce
voyage avec vous
de repasser par la terre qui germe dans
les mains enterrées, le chat oublié dans le frigo, les couteaux et
le lait montrés par la Louve, refaire tout ça entre les fauteuils
bleus
la salle était si mate, le son
s'absorbait et moi je me lovais dedans
je comprenais que vous ne bougiez plus
et puis j'avais joué si longtemps
agenouillée près du piano ou les
doigts qui couraient sur la guitare
merci Menuiserie oui pour ce partage si
précieux
credit photo : Pierre Louatron |
Un de mes groupes fictifs parallèles
et de moins en moins fictif était venu me voir au complet
un autre s'était mis à apparaitre et
disparaitre au grès des besoins d'heureux présages
deux personnes étaient venues
spécialement de Belgique
Plein de gens venaient me parler
je ne pouvais pas dire toute ma
gratitude
de tous ces amis et inconnus rassemblés
là
et tout sonnait comme une chanson
lumineuse dans un brouillard épais
je suis repartie dans la nuit, en
racontant et écoutant des histoires
chère Menuiserie, tu es une maison
pleine de berceuses, et de réconfort
merci de m'avoir reçue, merci à
chacun de vous, venu.e habiter cette salle pendant quelques heures,
merci pour les coeurs ouverts et les rires francs
merci pour la soupe et les céleris
rôtis
merci pour les bras si grands
et les messages d'ivresse dans la nuit
les montagnes autour du train me font
signe que j'arrive bientôt
et dans ma tête, j'ai les échos du
concert de l'hypnotisante Michèle Gurevitch hier soir
qui sans se départir de sa classe
calme, de cet incroyable magnétisme,
disait, alors que le micro ne se
laissait plus toucher sans crier
"The Mistakes
are the best part." "It's where you can really see us "
2 commentaires:
Merci à toi ...
Merci à toi, j'y étais avec une amie ce soir là, et tu nous as fait voyager par delà nos espérances.
Un moment tout doux et fort à la fois, comme l'écume de l'eau sur la roche, une plume sur le béton... j'ai rit, pleuré, et j'aurais aimé que ça ne s'arrête jamais.
Ce n'est pas souvent que je m'éprends d'un(e) artiste, alors encore une fois, mille merci pour ces instants de pur bonheur, continue comme ça, je reviendrais t'écouter.
A très vite,
Velna
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